Religion, morale et I.V.G.

 

Toutes les sectes, qu'elles relèvent ou non du statut de religion établie et reconnue, ne se contentent pas de condamner l'Interruption Volontaire de Grossesse mais en interdisent la pratique à leurs adeptes et, en tant que lobbies, font pression sur le Politique (Gouvernement, Législateur…) pour qu'il en fasse de même ou revienne sur sa légalisation lorsque celle-ci a pu être acquise à force de luttes.

L'argument des religieux est double : un être humain apparaît dés la rencontre – même hasardeuse ou accidentelle, dans le cas d'une conception non consciemment voulue,  contrainte dans le cas d'un viol ou "immorale" dans celui d'un inceste ! – d'un ovule et d'un spermatozoïde d'une part et, d'autre part, toute créature vivante, humaine ou non, est tout à la fois l'œuvre – au sens de création – et la propriété de… dieu. De ce fait, une I.V.G. serait l'"assassinat d'un être vivant au sens d'enfant de dieu".

Notons que cette "datation" de la naissance de la vie et de la nécessaire "protection" – interdiction de son interruption – qui en résulterait, du strict point de vue religieux, se heurte à une sérieuse objection :

En effet, pour toutes les sectes, la véritable "naissance" d'un individu est sanctionnée et sanctifiée par le baptême ou par toute autre forme d'initiation rituelle. Ainsi, avant le baptême, il y a soit un "être déchu" parce que souillé par le péché originel (!?!) et donc œuvre, jouet, suppôt… du "non-dieu" qu'est le démon, soit même un "non-être" puisque n'est pleinement et véritablement "être" que l'"élu" ou la "créature" de dieu et qu'en dehors de dieu et de son "peuple"… point de salut et donc de… (vraie) vie.

Ainsi, sur la base d'un tel dogme, une I.V.G. serait soit l'élimination d'un être sinon démoniaque, du moins entre les mains du démon et, par là-même, le "sauvetage d'une âme égarée"[1], soit la "suppression" de "quelque chose" qui ne serait ni créature humaine ni même "vie" en tant qu'œuvre de dieu. Dans les deux cas, elle ne saurait être contraire ni à la religion et à ses dogmes, ni à dieu lui-même et, de ce fait, condamnable et susceptible d'être interdite !

Rappelons aussi que, tout comme dans les sociétés (quasi) laïques, là où il n'y a d'autre "état civil" que les registres ou rituels (baptême, fêtes, initiation…) d'une secte, une naissance - et donc l'effectivité d'une vie humaine individuelle et individualisée – n'est reconnaissable et sanctionnable au regard de la collectivité que…post partum, nul n'étant obligé de "déclarer" une grossesse et, a fortiori, une "conception" réelle ou supposée  au(x) greffier(s) de ces "états civils" et que l'on ne peut donc pas voir comment on pourrait être l'"assassin d'un être vivant" qui ne serait ni reconnu, ni même seulement déclaré comme "être vivant en puissance" !

Lorsqu'ils se prétendent dégagés de toutes influences religieuses (!?!), les "détracteurs" de l'I.V.G. fondent leur condamnation/interdiction en… morale au motif qu'au terme d'un pur raisonnement tautologique, kafkaïen, ubuesque, absurde…, il serait… immoral de mettre fin à une vie même lorsque celle-ci est ante partum.

Or, une I.V.G. n'est ni une question, ni un problème de morale, qui est le regard et le jugement de l'Autre et donc des autres sur l'Une, mais est – et, en tous les cas, doit être – l'exercice de cette "qualité" fondamentale, essencielle de l'Une au regard de son Humanité qu'est… la Liberté. La Liberté et non une liberté qui serait "autorisée", "concédée", "tolérée"… par un droit - ou un usage –[2]. La Liberté d'un individu unique qui, parce qu'humain, ne saurait être la propriété d'un autre, voire des autres par le renoncement à son individualité unique que serait sa soumission à une morale, la morale des autres. La Liberté d'être ce que l'on est et de devenir ce que l'on veut être et donc, aussi, de (ne pas) donner vie à un autre être unique.

Aussi, si l'établissement d'un droit sanctionnant la "licité" du recours à une I.V.G. comme la manifestation individuelle de la  Liberté universelle inhérente à l'Humanité de tout individu peut être "public", ne serait-ce que parce qu'il implique un combat à mener contre ceux qui le refusent ou veulent l'abroger, le recours à une I.V.G. est un choix libre de vie nécessairement et exclusivement individuel qui ne concerne que l'Une et, en aucun cas, l'Autre et, partant, les autres.

Si l'I.V.G. peut-être une "affaire" de société – un débat, un combat de "principe", d'universalité… - ; en revanche, une I.V.G. est l'affaire exclusive d'un(e) individu.



[1] Rappelons que, sur cette base, il est "légitime" de brûler une sorcière, de tuer un païen, de lapider un blasphémateur… pour les soustraire au démon et les… sauver !

[2] Quand bien même il n'est pas inutile qu'un droit la reconnaisse et, en même temps, la "protège" en en rendant licite son usage.


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