Révolté, pas… révolutionnaire

 

Aux anarchistes anonymes

 emprisonné(es), maltraité(e)s, torturé(es), blessé(e)s, assassiné(e)s,

vilipendé(es), décrié(e)s, détesté(e)s, craint(e)s,

chanté(e)s, insulté(e)s, oublié(e)s, ignoré(e)s…

parce que, n'ayant ni dieu, ni maître, ils/elles savent rester debout,

libres pour elles et eux-mêmes,

mais aussi pour les autres

quitte à en…

mourir mais, toujours,… debout

 

"La révolution veut changer les institutions. La révolte consiste à refuser de se laisser gouverner par des institutions"[1].

Cette citation de Max STIRNER faite par Charly dans le numéro de novembre 2001 d'Alternative libertaire m'a… "turlupiné". D'où cet article…

 

Selon le Petit Larousse, une révolution,  du latin revolutio, de revolvere, retourner, est :
1. a. Mouvement orbital périodique d'un corps céleste, notamment d'une planète ou d'un satellite, autour d'un autre de masse supérieure ; période de ce mouvement, appelée aussi période de révolution.

b. [Physique] Mouvement périodique d'un objet autour d'un axe ou d'un point central.

2. [Géométrie] Surface de révolution : surface engendrée par la rotation d'une courbe (la génératrice) autour d'une droite fixe appelée axe de révolution.
[…].
4. Changement brusque et violent dans la structure politique et sociale d'un État, qui se produit quand un groupe se révolte contre les autorités en place et prend le pouvoir. La révolution de 1848.

5. Changement brusque, d'ordre économique, moral, culturel, qui se produit dans une société. Une révolution dans la peinture. – Révolution culturelle : bouleversement profond des valeurs fondamentales d'un groupe, d'une société.

Ainsi, au sens premier, une révolution est, en quelque sorte, un mouvement physique consistant à revenir à un état - ou un point – initial, antérieur, voire à… tourner en rond autour d'une centralité, étant précisé que l'élément ainsi tournant se situe à la périphérie de ladite centralité et qu'il est condamné à ne jamais l'atteindre !

Au sens politique, une révolution est le renversement d'un pouvoir et la substitution d'un nouveau… pouvoir. C'est ainsi, que l'Histoire a enregistré des révolutions de… palais, de chambre, de rue, de majorité… mais aussi des contre-révolutions, c'est-à-dire des pouvoirs destitués tendant et, parfois, réussissant à reprendre le pouvoir ! Il y a ainsi eu la Révolution française de 1789 qui fut une révolution bourgeoise, la révolution brabançonne, la révolution de 1848, la Commune de Paris (que l'on désigne rarement, du moins, dans les manuels d'histoire, par le terme de révolution… communarde), la révolution bolchevique, la révolution culturelle qui, en Chine, consista à la reprise du pouvoir (pour un temps) par le grand timonier, la révolution des œillets…

Dans ce sens, des actions, des mouvements, des organisations… sont qualifiés de… révolutionnaires : partis, armées, guérillas, syndicats, associations, clubs, grèves, justices, tribunaux, économies, baptêmes, calendriers, mariages, divorces, morales, symboles,  manifestations, arts, guerres, résistances, panthéons, leaders, imageries, … mais aussi des gouvernements et donc des… États, autrement dit des ordres qui, par nature, sont… oppressifs et répressifs !

Or, ce qui me gêne en tant qu'anarchiste c'est que, même qualifiées de révolutionnaires, ces institutions restent des institutions, c'est-à-dire des pouvoirs institués – avec, souvent, une dimension religieuse – dont les relations  aux autres – sujets, citoyens, camarades, ennemis, contre-révolutionnaires… - sont d'autorité, autrement dit de domination, d'oppression, de répression, d'exclusion, d'interdiction, d'exploitation, de discrimination…

Or, l'anarchisme se propose d'abolir non seulement l'État – dans toutes ses particularités spatiales et historiques – mais, plus généralement, toute forme de pouvoir[2] pour fonder entre les libres humains des relations… (véritablement) humaines de solidarité, de fraternité, de respect, de coopération, de partage, d'égalité, de dignité…. dans la mesure où il ne saurait y avoir de véritable humanité que… dans la liberté de l'un(e) et  des autres.

C'est pourquoi, anarchiste, en définitive, je ne saurais prétendre à abolir un ordre pour lui substituer un autre ordre - ou même un contre-ordre – car, même qualifié de libertaire ou d'anarchiste, il serait la stricte antinomie de… l'anarchie qui est l'absence… d'ordre (et donc, aussi, de pouvoir, d'autorité, de chef…) !


De ce fait, je ne suis pas un… révolutionnaire sauf à prendre le terme de révolution dans son acception de changement radical, de rupture définitive, de bouleversement qui, en abolissant, un ordre – et, au-delà, l'Ordre, le Pouvoir, l'Autorité… - aurait pour effet de permettre l'émergence d'un… non-ordre : l'anarchie, le règne[3]de la liberté !

En revanche, je me reconnais, je m'affirme, je m'assume… révolté au point de considérer que ma révolte est une caractéristique essencielle de mon identité/unicité : l'expression et, dans une certaine mesure même, le fondement de ma… liberté, autrement dit de mon… humanité !

Ma révolte est double ; elle est à la fois réactive et active :

 

Ma révolte réactive est celle du cœur[7] ; c'est elle qui me fait avoir des coups de gueule – et, parfois, je l'avoue volontiers, des coups de sang -, des colères[8], des élans de solidarité (même si, souvent, ils restent discrets, anonymes)…

Ma révolte active est celle de la raison l'action militante contre l'Ordre – et donc tous les ordres – en conformité avec mes convictions libertaires, mon projet anarchiste et mon éthique humaniste. Certes, en raison de mon isolement aux causes multiples, elle est… modeste et ne prend souvent que la forme de mots – les seules armes que je sais et veux utiliser - ; elle n'en est pas moins sincère, véritable et entière (je suis même tenté de dire… pure). En tous les cas, elle… est, parce que je suis, sachant que je ne puis être que parce qu'elle… est !

Et c'est parce que ma révolte est isolée que je souhaite la rendre solidaire d'autres révoltes et donc me rendre solidaire d'autres individus afin de lui permettre d'être  plus efficace, plus retentissante et que j'aspire tant à l'unité fraternelle et solidaire de tou(te)s les révolté(e)s, autrement dit de tou(te)s les anarchistes ou libertaires, peu importe le nom qu'on leur donne ou qu'ils/elles revendiquent dés lors que nous sommes sœurs et frères en révolte en espérant qu'un jour nous pourrons – ou d'autres que nous pourrons – l'être en… anarchie !



[1] Max STINER, cité par Charly in Alternative libertaire n° 8(244) de novembre 2001.

[2] Et donc d'autorité puisque l'autorité n'est jamais que l'expression d'un… pouvoir !

[3] Comme on parle de règne animal, végétal, minéral…

[4] Je préfère ce terme à celui d'intolérance puisque la tolérance n'est jamais qu'une autorisation, une permission, une dérogation… accordée par… une autorité qui peut tout aussi, du jour au lendemain, la retirer. Cf. par exemple, en France, l'édit de Nantes accordé par un roi et aboli par un autre).

[5] Qui, anonyme, est toujours celles des autres, autrement dit celle d'un ordre contre les individus alors que, en revanche, bien entendu, j'ai une éthique qui, à l'usage, me semble bien plus sévère et exigeante que la morale puisqu'elle est ma conscience et que celle-ci fonctionne 24 heures sur 24 et ne me pardonnerait pas le moindre écart !

[6] Système oppressif par excellence puisqu'il a pour fonction d'accoutumer les humains au port du maître et donc à se fondre anonymement dans le troupeau.

[7] Elle n'est pas pour autant dénuée de raison, de bon sens

[8] Pourtant, je ne gueule/aboie après personne !


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