De Sangatte à Paris : l'exil sans fin des kurdes irakiens

 

Des chiens qui courent après des hommes qui fuient, tombent, se rattrapent, trébuchent de nouveau et une fois à terre tentent de se protéger, se débattent et hurlent. Loin d'être la vision d'une lointaine chasse à l'homme dans un pays sous le joug d'un dictateur, c'est une scène qui sans cesse se répète depuis 1999, la nuit le long d'Eurotunnel à quelques pas de Calais. Visages tuméfiés, mains ensanglantées, corps meutris transis de froid c'est le quotidien qu'ont toujours à affronter, aujourd'hui à "les exilé" de Sangatte. Car depuis le fermeture de ce camp humanitaire en novembre dernier à défaut d'avoir disparus, ces hommes et ces femmes qui ne s'imaginent d'avenir que de l'autre coté de la Manche, en Angleterre continuent chaque jour de tenter d'y passer clandestinement au péril de leurs vies.

17h30, un jeudi soir du mois de Mars, à l'angle des boulevards Magenta et de la rue du Fg St Denis, une "descente de police" devenus ordinaire dans ce quartier, son objectif contrôler et "embarquer" la centaine de Kurdes irakiens qui s'y rassemblaient pour "nettoyer" les abords du jardin Alban Satragne et satisfaire le "besoin de sécurité" des riverains.

La fermeture du "centre" de Sangatte ouvert en septembre 1999 pour assurer un minimum de secours aux exilés qui survivaient dans la région de Calais dans l'attente d'un passage clandestin, n'aura en rien résolu ce phénomène. C'est désormais, à Cherbourg, Caen, Dunkerque, Ouistreham et dans d'autres ports face à l'Angleterre que des milliers de personnes se cachent désormais, mais aussi et toujours à Calais ou en permanence entre 200 et 300 personnes survivent dans les rues, traqués par la police, pourchassés jusqu'aux abords des églises et mobil homes ou quelques associations et citoyens de la ville ont décidés de continuer à les aider pour qu'ils puissent se nourrir, se doucher, se reposer.

A Paris, dans les semaines qui précédaient la fermeture de ce "centre" au statut administratif plus que flou, une circulaire du ministère de la sécurité intérieure daté du 24 septembre 2002 ayant pour objet la maîtrise des flux migratoires à destination du Royaume Uni donnait en quelques mots toutes latitude aux forces de police pour "dissuader"les exilés de tenter de se rendre vers la Manche. Sa traduction concrète et peu médiatisée se matérialisera par des arrestations, des fouilles avec destruction des billets de trains pouvant mener vers Calais, des courses poursuites dans toute la région à grand renfort de chiens-loups, de projecteurs, de gaz lacrymogènes. Au total des dizaines de blessés, de renvois vers l'Afghanistan et des centaines d'invitation à quitter le territoire dans les 48 heures ou bien encore de fermes conseils a demander l'asile ici en tentant d'oublier les nuits de terreur, les insultes, les humiliations, les coups, les crocs des chiens, la faim, le froid, la brûlure des gaz lacrymogènes due à la police française.

Mi janvier, suite à la fermeture du centre : 1800 personnes avaient été éloignés de la région, et environ 1000 avaient acceptés de demander l'asile, 150 Kurdes d'Irak pour le moment "non reconductibles" étaient assignés à résidence loin de Calais, et ceux qui fichés étaient arrêtés dans la région écopaient de 3 mois de prison ferme. Les Afghans venant comme chacun sait d'un pays désormais en paix sont désormais expulsés.

Comment demander l'asile en France ? quand on sait que l'on est voué à entre 12 mois et 18 mois d'attente, à un hébergement dans un foyer d'urgence et à la rue durant chaque journée, comment demander l'asile en France quand on a traversé plusieurs frontières, risqué sa vie, eus a subir les traques incessantes et que l'on est condamné a n'être bienvenus nulle part, quand on n'a pas de "diaspora" pour espérer y trouver de l'aide, comment et pourquoi demander l'asile face à la suspicion et l'arbitraire, au mépris, à la peur et à la violence. Qui peut s'y résoudre quand de plus il parle anglais et a des amis, de la famille de l'autre côté d'un bras de mer ? Ne reste que la possibilité de rêver encore qu'il est possible de passer avec l'aide de passeurs si il le faut.

Comme toutes les structures d'hébergements d'urgence conçus pour les sans-logis sont durant l'hiver saturées, il ne reste alors que la rue, quelques jardins et quelques places pour se regrouper, se tenir chaud, dormir, manger et faire ces besoins puisque rien n'est aujourd'hui prévus à Paris pour faire face a ces réalités si terriblement humaines de base. "Le Xéme ne sera pas un nouveau Sangatte" prétend le maire de l'arrondissement, "C'est du ressort de l'état" rétorque t'on à l'Hôtel de ville.

En attendant contrôles et rafles se multiplient dans le quartier.

Une France propre sans attroupements, sans pauvres visibles, sans exilés dérangeants se prépare.

Elle se construit un peu plus chaque jour entre sentiment d'insécurité et "ras le bol des nuisances", l'accueil, la fraternité, la solidarité ont disparus des têtes pour ne devenir que des formules voués a des campagnes de marketing.

Habitants de Paris, réveillez vous dans nos rues on traque sous vos yeux ceux qui n'ont nulle part où aller.

ZPAJOL liste sur les mouvements de sans papiers


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