Le patriotisme

Paul Henri Dietrich baron d'HOLBACH / La Morale universelle (II) / Amsterdam M.-M. Rey 1776 : "Celui qui n'a rien que ses bras, n'a point à proprement parler de patrie, il est bien partout où il trouve les moyens de subsister ; au lieu que l'homme opulent peut être utile à bien des gens, est en état d'assister sa patrie, au destin de laquelle il se trouve intimement uni par ses possessions, dont la conservation dépend de celle de la société. Tandis qu'au siège de Corinthe les habitants s'empressaient à repousser l'ennemi par toutes sortes de moyens, Diogène, pour se moquer de leurs embarras, s'amusait follement à remuer son tonneau."

Victor HUGO / Choses vues / Histoire / œuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1987 : "Ne soyons plus anglais ni français ni allemands. Soyons européens. Ne soyons plus européens, soyons hommes. - Soyons l'humanité. Il nous reste à abdiquer un dernier égoïsme : la patrie."

Gustave FLAUBERT / Correspondance I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1973 : "Je ne suis pas plus moderne qu'ancien, pas plus Français que Chinois, et l'idée de la patrie c'est-à-dire l'obligation où l'on est de vivre sur un coin de terre marqué en rouge ou en bleu sur la carte et de détester les autres coins en vert ou en noir m'a paru toujours étroite, bornée et d'une stupidité féroce."

Ernest RENAN / L'Avenir de la science, Pensées de 1848 (1890) / GF 765 Flammarion 1995 : "La perfection de l'humanité ne sera pas l'extinction, mais l'harmonie des nationalités : les nationalités vont bien plutôt se fortifiant que s'affaiblissant ; détruire une nationalité, c'est détruire un son dans l'humanité." "[...] l'homme du peuple est bien plus sensible à la gloire patriotique que l'homme plus réfléchi, qui a une individualité prononcée. Celui-ci peut se relever par lui-même, par ses talents, ses titres, ses richesses. L'homme du peuple, au contraire, qui n'a rien de tout cela, s'attribue comme un patrimoine la gloire nationale et s'identifie avec la masse qui a fait ces grandes choses. C'est son bien, son titre de noblesse, à lui. Là est le secret de cette puissante adoption de Napoléon par le peuple. La gloire de Napoléon est la gloire de ceux qui n'en ont pas d'autres."

Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990 : "Croire au village, c'est donner une limite à sa vie ; c'est lui croire un sens, et elle n'en a pas. C'est un peu sot de s'imaginer que nous avons une raison d'être là plutôt qu'ailleurs. Continuer nos pères, pour quoi faire ? Ils ne savaient pas. La feuille a une attache qui lui suffit. Le cerveau est nomade. Pas de petite patrie. Une fuite résignée. Être n'importe où, ne jamais consentir à se fixer comme si un point dans l'univers nous était réservé. N'ayons pas d'orgueil ! Au premier éclair de lucidité nous verrions que nous sommes dupes, et nous serions pleins de pitié pour nous mêmes. Livrons-nous à l'universelle loi d'éparpillement. Ne pas être un homme qui regarde son village avec une loupe. Rappelons-nous que ce monde n'a aucun sens."

Paul LÉAUTAUD / Passe-temps / œuvres / Mercure de France 1988 : "Vous êtes nés dans ce pays et vous en êtes fier et vous lui êtes attaché. Vous seriez né dans un autre pays, vous en seriez tout aussi fier et vous lui seriez attaché de même. Mieux, même : né ici, on vous aurait aussitôt transporté dans un autre pays où vous auriez été élevé et auriez grandi ? Vous seriez de ce pays et c'est de lui que vous seriez fier et ce pays auquel vous seriez attaché. Supposez que les bruns se mettent à être fiers d'être bruns, avec une idée de prévalence, - et qui dit prévalence dit bientôt rivalité, - sur les blonds ou vice versa ? Vous voyez si vous êtes comique avec votre orgueil national et votre patriotisme : vous avez eu autant de part à être de ce pays plutôt que d'un autre, que les bruns à être bruns et les blonds à être blonds."

Ambrose BIERCE / Le Dictionnaire du Diable (1911) / Éditions Rivages 1989 : "Patriotisme n. Matériau combustible susceptible de servir de torche à quiconque ambitionne d'illuminer son nom. Dans le célèbre dictionnaire du Dr. Johnson, le patriotisme est défini comme le dernier recours du scélérat. Avec tout le respect dû à un brillant quoique inférieur lexicographe, je me permets d'affirmer que c'est le premier."

Georges DARIEN / La Belle France (1900) / Voleurs ! / Omnibus Presses de la Cité 1994 : "Le patriotisme n'est pas seulement le dernier refuge des coquins ; c'est aussi le premier piédestal des naïfs et le reposoir favori des imbéciles."

Jean COCTEAU / Journal (1942-1945) / Gallimard 1989 : "Une patrie c'est la rencontre d'hommes qui se trouvent instantanément au même niveau." Écartèlement (1979) / œuvres / Quarto Gallimard 1995 : "Un homme qui se respecte n'a pas de patrie. Une patrie, c'est de la glu.". Aveux et anathèmes (1987) / œuvres / Quarto Gallimard 1995 : "On n'habite pas un pays, on habite une langue. Une patrie, c'est cela et rien d'autre."

 

Diderot et… dieu

 

"Tous les peuples ont de ces faits, à qui, pour être merveilleux il ne manque que d'être vrais ; avec lesquels on démontre tout, mais qu'on ne prouve point ; qu'on n'ose nier sans être impie, et qu'on ne peut croire sans être imbécile." (Pensées philosophiques)

"Le déiste seul peut faire tête à l'athée. Le superstitieux n'est pas de sa force; son Dieu n'est qu'un être d'imagination. (Idem)

"L'idée qu'il n'y a pas de Dieu ne fait trembler personne ; on tremble plutôt qu'il y en ait un." (Idem)

 "Le Dieu des chrétiens est un père qui fait grand cas de ses pommes et fort peu de ses enfants." (Idem)

"La superstition est plus injurieuse à Dieu que l'athéisme." (Idem)

"Il ne faut pas imaginer Dieu ni trop bon, ni méchant. La justice est entre l'excès de la clémence et la cruauté, ainsi que les peines finies sont entre l'impunité et les peines éternelles." (Idem)

"Quel est donc ce Dieu ? Un Dieu plein de bonté... Un Dieu plein de bonté trouverait-il du plaisir à se baigner dans les larmes?" (Idem)

"Parce qu'un homme a tort de ne pas croire en Dieu, avons-nous raison de l'injurier ? On n'a recours aux invectives que quand on manque de preuves."

(Idem)

"L'incrédulité est quelquefois le vice d'un sot, et la crédulité le défaut d'un homme d'esprit." (Idem)

"Il y a des gens dont il ne faut pas dire qu'ils craignent Dieu, mais bien qu'ils en ont peur." (Idem)

"S'il y a cent mille damnés pour un sauvé, le diable a toujours l'avantage sans avoir abandonné son fils à la mort." (Addition aux Pensées philosophiques)

"Si la raison est un don du Ciel et que l'on en puisse dire autant de la foi, le Ciel nous a fait deux présents incompatibles et contradictoires." (Idem)

"L'idée qu'il n'y a pas de Dieu ne fait trembler personne ; on tremble plutôt qu'il y en ait un." (Idem)

"Si la raison est un don du ciel et que l'on en puisse dire autant de la foi, le ciel nous a fait deux présents incompatibles et contradictoires." (Idem)

"Je crois en Dieu, quoique je vive très bien avec les athées. Je me suis aperçu que les charmes de l'ordre les captivaient malgré qu'ils en eussent ; qu'ils étaient enthousiastes du beau et du bon, et qu'ils ne pouvaient, quand ils avaient du goût, ni supporter un mauvais livre, ni entendre patiemment un mauvais concert, ni souffrir dans leur cabinet un mauvais tableau, ni faire une mauvaise action." (Lettre à Voltaire du 11 juin 1749)

"Si vous voulez que je croie en Dieu, il faut que vous me le fassiez toucher." (Lettre sur les aveugles)

"La bonne religieuse est celle qui apporte dans le cloître quelque grande faute à expier." (La religieuse)

"Ce qui caractérise le philosophe et le distingue du vulgaire, c'est qu'il n'admet rien sans preuve, qu'il n'acquiesce point à des notions trompeuses et qu'il pose exactement les limites du certain, du probable et du douteux." (Lettre à Sophie Volland - 26 Septembre 1762)

"La perfection évangélique n'est que l'art funeste d'étouffer la nature..." (Lettre à Sophie Volland)

"Et ses mains ourdiraient les entrailles du prêtre,

A défaut d'un cordon, pour étrangler les rois."

"L'homme est le terme unique d'où il faut partir et auquel il faut tout ramener."

"Dieu n'a fait ni maître ni serviteur, je ne veux donner ni recevoir de lois."

"Dieu : un père comme celui-là, il vaut mieux ne pas en avoir."

(Poésies diverses)


 

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