La Chaîne des êtres
Émile Henry
[Le père d'Émile Henry était
poète comme lui et, comme lui, dans ses vagues rêveries, il parlait de rénovation
sociale. Dans une pièce philosophique intitulée
"Codes incohérents,
Enfantés par l'effroi, ce tyran des tyrans !
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Que la sainte Unité harmonisant le monde
Rende les Cieux plus doux, la terre plus féconde
Alors arrivera, ici-bas, comme au Ciel,
Le règne du vrai Dieu, règne attractionnel.
Atavisme poétique et nuageux du côté de son père, atavisme régicide du côté de son oncle.
D'autres fois la muse anarchiste a un autre ton : elle prend des allures guerrières — guerrières à sa façon ; mais alors le poète n'est point un compagnon militant et agissant: il paraît être un farceur faisant de la poésie anarchiste comme d'autres originaux font de la poésie naturaliste. Voici un échantillon de cette poésie, œuvre d'un fantaisiste inconnu et dont le nom, du reste, ne mérite guère de passer à la postérité:
Le député que tu nommes
Pour te faire des lois
Serait-il le meilleur des hommes,
Il n'en vaut pas trois (?)
Nuit et jour il fait ripaille,
Il se fait du lard;
Envoie faire f... cette valetaille.
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Ah ! n... de Dieu ! faut qu'ça change.
Assez de perroquets,
Y faut sortir de cette fange,
Ouvrons les quinquets,
Gouvernant, patron, jésuite,
Tout ça sent le mouchard;
Faut leur f... d' la dynamite...
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Quand nous avons faim au ventre
Alors pourquoi mendigoter,
Tous les moyens sont bons, que diantre !
Tout est permis, voler, tuer.
Dynamitez le parasite,
Sur autrui nul ne doit compter,
Prenez au tas, ça va plus vite.
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Quand nous allons dans les casernes,
Où l'on cherche à nous abrutir
Avec un tas de balivernes
Auxquelles il faut obéir,
A tous les frères endormis,
Parlant de grève générale,
Nous préparons
Des insoumis.
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Bourgeois, tu nous constipes,
Avec tes grands principes.
Tes lois et tes vertus,
Je m'assois dessus.